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gouttes rue du colibri
Article – blog du colibri

Ma bataille par Lionel

Lionel nous offre ici une leçon de vie. Par le témoignage émouvant du combat de cet homme contre le cancer, nous percevons l’impact immense que cette maladie a sur la vie des personnes qu’elle touche. Nous découvrons les hauts et les bas de ce long parcours, ainsi que tout ce qu’il révèle chez les personnes qui le vivent au quotidien. La solidarité, le courage, la résilience…
Je me présente Lionel CAVALIER, 62 ans. Marié et père de deux garçons âgés de 38 et 29 ans.

Retraité de la Gendarmerie depuis le 1er juin 2017, j’occupe depuis un emploi à temps partiel dans une association d’aide aux victimes : France Victimes 71 à Mâcon.

Avec mon épouse nous habitons dans une jolie petite maison à Paray le Monial 71 et nous partageons une activité sportive, la course à pied. Nous ne sommes pas des champions, mais nous parvenons toujours à accomplir nos objectifs en courses sur route ou trails, grâce à notre volonté.

Je me souviendrai toujours du 11 septembre 2001, les attentats aux USA. Mais je me souviendrai également de ce qui pour moi a également été un désastre, du 04 septembre 2019.
Portrait de Lionel, un homme qui partage son combat contre le cancer

S'agit-il de la date où vous avez appris votre maladie ?

En août 2019 suite à des sciatiques récurrentes et de vives douleurs lombalgiques, on me prescrit en effet de passer un scanner au niveau des vertèbres lombaires. Cet examen se déroule le 04 septembre 2019, au Centre Hospitalier de Paray le Monial.

Outre des atteintes au niveau de vertèbres L4/L5 et S1, le radiologue relève la présence d’une masse pouvant être un sarcome au même niveau. Cette masse est importante car ses dimensions sont de 16.5 cm sur 6 cm.

La prise en charge au CLB (Centre Léon Bérard) va être alors rapide, puisque par l’intermédiaire d’une connaissance de mon fils aîné Mickaël, le Docteur DUPLOMD Sophie, je vais obtenir un rendez-vous pour le 16 septembre 2019 avec le Docteur MEEUS Pierre. Il m’est demandé avant le rendez-vous de procéder à un examen complémentaire par IRM.

Lors de ce premier rendez-vous, le Docteur MEEUS examine scanner et IRM. Il n’établit alors aucun diagnostic hormis celui de confirmer la présence d’un sarcome dans ma zone pelvienne en appui sur les vertèbres L4/L5, causant ces sciatalgies.

Au cours de l’entretien, auquel mon épouse Geneviève participe également, il nous fait part d’une similitude observée chez un patient opéré par lui, il y a quelques temps, de ce qui pourrait être une tumeur dans la zone pelvienne.

Le nerf sciatique avait été coupé, et malgré tout, un an après il avait reçu une photo dudit patient qui avait, lors d’une randonnée, gravi une montagne malgré son handicap ; en effet, la section du nerf sciatique entraîne la perte de la mobilité totale de la jambe. Il a des paroles rassurantes, en disant : « pour vous ce n’est peut-être pas le cas… mais il faut attendre la suite des examens ».

Comment avez-vous réagi à cette annonce ?

C’est donc ce jour-là 16 septembre 2019 que je prends conscience réellement de ce qui m’arrive. J’ai l’impression de tomber dans un gouffre et que je vais m’y perdre. Je me vois déjà dans un fauteuil roulant, ou avec la jambe dans une attelle me déplaçant avec deux béquilles.

Comment va se dessiner mon avenir ? Moi qui courais 2 à 3 fois par semaine, j’avais encore des objectifs sportifs. Tout allait prendre fin. Des larmes coulent alors….

Quand avez-vous eu la confirmation d’un cancer ?

Portrait de Lionel à l'hôpital avant sa biopsie, qui sourit en remerciement à l'équipe médicale
Pris en charge par ce chirurgien, les examens se poursuivent alors par un scanner thoracique pelvien et une biopsie de la tumeur. Le scanner ne relève la présence d’aucune ramification à ce sarcome.

Une biopsie est effectuée le 1er octobre 2019. Je ne sais pas ce qui m’attend. Dans le couloir qui mène aux salles, je croise un patient sur un lit, sous perfusion et accompagné de sa femme. Il a perdu toute pilosité. Il est beaucoup plus jeune que moi. Ça me touche.

La biopsie se passe beaucoup mieux que prévu. La radiologue qui me conduisait au scanner, m’a dit, après, avoir vu la crainte dans mes yeux. Les résultats tombent le 21 octobre lors d’un rendez-vous avec le Docteur MEEUS. Il m’oriente alors très rapidement vers la Docteur DUFRESNE, Oncologue.
Le résultat de la biopsie révélant la présence de cellules malignes, donc cancéreuses, l’équipe médicale met en place un traitement par chimiothérapie avant intervention chirurgicale. Je vais ainsi suivre 6 cures de novembre 2019 à mars 2020. Le protocole m’est présenté. Un cathéter me sera ainsi placé dans le bras droit avant la 1ére cure.

Ces cures se dérouleront comme suit : via le PICC Line hydratation H24 du lundi 10h00 au jeudi 10h00, avec chimiothérapie les après-midis ainsi que divers produits de protection. Il va y avoir deux cures qui seront suivies d’un bilan. Bilan qui déterminera la suite des cures.

Pourriez-vous nous parler de la première chimio ?

Le 15 novembre 2019, on me pose donc un PICC Line dans le bras droit. Je vais devoir le garder jusqu’à la fin de tous les traitements. Placé à cet endroit je dois donc, en plus d’avoir stoppé la course à pied, mettre fin à mes séances de tir à l’arc.

Je me présente alors pour ma première séance, le 18 novembre 2019, au service 2BN du Centre Léon Bérard. L’aide-soignante me conduit alors dans ma chambre et me laisse m’installer. A ce moment-là, je réalise et des larmes coulent à nouveau.
Lionel entouré des siens pendant son parcours de cancer
L’infirmière arrive alors, et voyant mes larmes me propose de me laisser seul encore un peu. Non je suis prêt, je m’installe sur le lit et le premier branchement est fait. Les 3 jours se passent bien. Je supporte bien la chimiothérapie, et je ne ressens aucun effet secondaire particulier.

Le jeudi matin, le 21, une infirmière entre dans ma chambre, et me dit : « bon anniversaire monsieur Cavalier ! ». Que du bonheur. Durant ces trois jours, j’aurais ainsi pu faire un petit peu connaissance avec ce côté méconnu du cancer, le personnel soignant.

J’ai très vite été rassuré sur les compétences de mon chirurgien. Je sors donc le jeudi à 10h, pour ne revenir au CLB que 15 jours plus tard. Je vais alors rester sous hydratation durant 3 soirs. Une IDE viendra ainsi me brancher à 19h à domicile, pour revenir le lendemain matin à 07h me libérer. Ce sera le plus contraignant, car nos maisons ne sont pas adaptées au pied à perfusion, dont les roues en plastique dur résonnent sur le carrelage…

Comment se sont passées les autres séances de chimio ?

Lionel et sa femme, un soutien inconditionnel pendant son combat contre le cancer
La 2éme cure se déroule suivant le même schéma. Je vais alors continuer à tisser un relationnel avec le personnel du 2BN, et faire connaissance avec Solène, coach sportif de l’espace sportif pyramide du CLB. Elle me suivra dans cette activité durant mes séjours.

Le bilan par imagerie médicale qui va suivre n’est guère optimiste. La tumeur est toujours aussi grosse. Légèrement nécrosée. Néanmoins, le Docteur MEEUS semble satisfait et m’annonce que 04 autres cures vont donc suivre.
Il me représente le schéma d’une opération si elle était décidée. Section des nerfs sciatique et obturateur. Pontage et greffe vasculaire veine et artère iliaque. En effet, la tumeur en se développant a aussi phagocyté ces vaisseaux, les englobant et les comprimant un peu.

Avez-vous été soutenu pendant cette première phase ?

Je vais ainsi passer le réveillon de la Saint Sylvestre, au CLB, pour une 3éme cure. Passant un début de soirée avec ceux que j’aime. J’y fais aussi la connaissance de Julien, un jeune patient que je côtoierai jusqu’à la 6éme. Un bon vivant. Tous les après-midis, nous irons à la salle de sport, entraînant avec nous Nico. Sous les yeux amusés du personnel soignant, ravi de voir notre entrain.
Durant les 6 cures au service 2BN, je vais faire la connaissance de personnes formidables : administratifs, infirmières et aides-soignantes.
Leur empathie et leur écoute vont ainsi développer en moi un optimisme que je n’envisageais pas. Elles auront toujours une oreille ou un regard attentif à mes réactions, m’apportant ainsi l’énergie nécessaire à mon combat. Me rassurant par des paroles pleines d’encouragement. Les visites régulières de mes fils m’aideront aussi beaucoup, m’apportant même une fois une belle surprise.
Lionel, un homme qui se bat contre un cancer, et sa femme à l'hôpital

Comment a été décidée la suite de vos traitements ?

Suite à une dernière IRM, compte tenu des risques futurs malgré une nécrose de la tumeur, il est décidé d’un commun accord de procéder à une intervention chirurgicale et d’enlever ce sarcome. Sarcome qui outre des dégâts au niveau des nerfs de la jambe gauche a causé des dégâts au niveau vasculaire en zone pelvienne et jambe gauche.

Les risques me seront exposés au cours du dernier examen. Du fait de son importance, la section de certains nerfs (obturateur et sciatique) devrait avoir lieu et des pontages et/ou greffes vasculaires seront alors nécessaires.

L’opération est programmée le 12 mai 2020, lors d’un rendez-vous au premier jour de ma 6éme et dernière cure de chimiothérapie. Quelques jours auparavant, j’avais rencontré la Docteur DUFRESNE, oncologue qui m’a suivie durant ces cures.

A ma demande, elle m’avait exposé les risques de garder cette tumeur. Mon choix était quasiment fait, ses paroles m’ont conforté dans ma décision. Je ne vivrai pas en effet avec une grenade dégoupillée dans le ventre.

Au sortir du rendez-vous, je m’effondre tout comme mon épouse Geneviève. Le personnel du 2BN sera à mes côtés pour me soutenir dans cette pente que je veux remonter.
Lionel entouré dans son combat contre le cancer
Surtout ne pas sombrer, s’asseoir au bord du chemin et ne plus avancer. Se battre comme je l’ai fait jusqu’à présent, réagir. Mais ce n’est pas facile. Je suis également inquiet. Geneviève doit renter seule à Paray, il y quasiment 2 heures de route. Elle est aussi effondrée que moi.

Une infirmière prend alors un temps pour rester un moment avec nous et avec de bonnes paroles qui se veulent rassurantes, elle tente d’apaiser nos craintes. Le mot sera donné dans le service, car à chaque relève de poste, on vient prendre de mes nouvelles avec des paroles rassurantes.

Comment avez-vous vécu l’attente avant chirurgie ?

C’était le contrecoup nerveux de la décision prise. J’avais tenu jusqu’à présent, mais là les vannes se sont ouvertes en grand le jour de cette acceptation de l’opération devant le chirurgien.

Je passe le confinement en attente de l’opération qui par bonheur ne sera pas reportée. Car dans ma tête je suis prêt. La résilience s’est construite au fil du temps grâce aux relations humaines que j’ai eues au CLB. Une mise en confiance a peu à peu pris naissance en moi, boostant ainsi une force de caractère insoupçonnée.

Car là, Oui je suis prêt. Prêt à aller debout au bloc et en ressortir avec un handicap.

Mais surtout sans ce mal qui me ronge, ce crabe qui au fil des années a grossi dans ma zone pelvienne. Trouvant sa place de manière insidieuse parmi mes entrailles, sans rien laisser paraître à l’extérieur.

N’étant qu’une cause de mes sciatiques, m’empêchant de me livrer à mon sport favori, la course à pied. Me bloquant parfois dans d’autres activités manuelles ou physiques.

Dès octobre 2019 j’avais mis en place un plan avec des thérapeutes et des psychologues qui m’apporteront aide et paroles réconfortantes. Hypnose Eriksonienne, réflexologie plantaire et échanges seront d’une aide précieuse. Les séances s’étaleront durant tout le traitement et encore à ce jour.

J’aurai également des soins réguliers avec Agnès la socio-esthéticienne du CLB durant mes cures. Hélas, les mesures sanitaires dues à la COVID19 ne permettront pas l’accès, ensuite, à ce service.

Le sourire de Lionel à l'hôpital où il se bat contre un cancer
Il y aura aussi Dominique, du point information, qui sera également à mon écoute et m’orientera vers diverses activités. Encore des relations humaines constructives pour mon état et qui m’apporteront énormément.

Par quelles étapes passez-vous avant l'opération ?

Le confinement se termine. Période difficile à vivre, mais grâce au beau temps, j’ai pu profiter de la nature en allant marcher tous les jours durant l’heure accordée. Profitant également de marcher normalement car peut être dans quelques jours ce ne sera plus le cas.

Durant cette période, un ultime examen par imagerie médicale et un rendez-vous téléphonique avec mon chirurgien. La tumeur s’est-elle légèrement déplacée ? Toujours est-il qu’il m’annonce la probabilité qu’il y a une chance sur deux qu’il ne touche pas à mon nerf sciatique. Paroles rassurantes certes, comme il me le précise, il ne pourra en être certain qu’après avoir ouvert.

Le 11 mai 2020 en début d’après-midi, je pars donc seul dans le taxi qui m’emmène vers mon destin, au CLB. Accueil dans le service de chirurgie, où je m’installe sobrement, car je n’y reste que la nuit. Je n’y reviendrai qu’après l’opération et le séjour aux soins intensifs.

Deux internes viennent et me présentent le déroulé du début de matinée du lendemain. Quelques questions et un trait au feutre sur mon abdomen. Là où le scalpel ouvrira le passage aux mains expertes des Docteurs MEEUS et ALEKSIC, afin d’extirper la bête et réparer ce qui a été abîmé.

Deux anciens première ligne aux doigts d’or. L’opération devrait durer 4 ou 5 heures, on viendra me chercher vers 7 h30 demain. Je le dis à mon épouse et à mes fils. Une pilule va m’aider à avoir un sommeil apaisé.

Jusqu’à présent j’avais comparé ces épreuves de la vie à une course de trail. Les 6 cures de chimiothérapie des dénivelés et l’opération le finish avec un gros dénivelé plus important que les précédents. L’avenir me contredira.

Noël à l'hôpital avec une équipe soignante à l'écoute

Comment s’est déroulée l'intervention chirurgicale ?

Le 12 mai, vers 7 heures 30, on vient me chercher. Après une autre pilule « magique », j’ai eu droit à un café et j’ai revêtu mon pyjama bleu. Nous partons en marchant en direction du hall 3 où se trouvent les blocs opératoires.

Mon esprit est calme et serein je ne ressens aucune émotion particulière. Dans une salle d’attente, je rejoins 3 dames vêtues comme moi. Elles aussi vont affronter une grande épreuve. Nos regards ne se croisent pas, chacun dans ses pensées.
Pensées emplies de crainte ou d’appréhension. On appelle l’une d’elles, puis très rapidement moi. Accompagné par un assistant anesthésiste, nous nous dirigeons vers les blocs. Arrivé devant celui qui m’attend, je m’arrête dès l’entrée. Une lumière bleue éclaire cet espace.

Je me mets dans la peau du gladiateur qui va entrer dans l’arène, mesurant l’espace et tentant de discerner ce qui m’attend. On me fait asseoir sur la table et là tout va très vite. Péridurale, branchement de mon PICC Line sur les divers systèmes… et « dodoland » !

Mon réveil est douloureux. J’ai mal aux avant-bras, j’ai soif. Je perçois des présences multiples autour de moi. On me donne à boire, ou plutôt on me rafraîchit la bouche avec une bombe d’eau. Les souvenirs que j’ai de cette première nuit post opératoire sont très confus. A une ou deux reprises, je me retrouve avec un masque à oxygène sur le nez.

Dans quel état êtes-vous sorti de l'opération ?

Je ne retrouve la réalité que le mercredi matin. Mes premiers mots : « Pourrais-je avoir un café et j’ai faim ». Le personnel est hyper prévenant, car sur la tablette à ma gauche il y a mon téléphone, le chargeur et les écouteurs. D’initiative, aux soins intensifs, ils ont sorti cela de ma sacoche pour les mettre à ma disposition poursuivant ainsi la prévenance de l’ensemble du personnel du CLB.

Le Docteur MEEUS et ses assistants passent. L’opération a été plus longue que prévue, 8 heures au lieu de 4 ou 5.
Visite masquée pendant le séjour à l'hôpital de Lionel où il reçoit ses soins contre le cancer

J’ai fait une hémorragie. Mon nerf sciatique a été sauvé, simplement gratté pour enlever toute trace possible de cellules cancéreuses. Comme prévu, le nerf obturateur a été sectionné, un pontage et une greffe sur la veine iliaque gauche.

Il m’autorise à boire un café et à manger. J’ai droit à une mousse au chocolat. Je reconnais celle qui nous a été proposée lors d’un atelier avec le Chef Christian TETEDOIS, durant une cure de chimiothérapie.

Je vais rester aux soins intensifs, jusqu’au dimanche 17 mai. Après quelques séjours assis, maîtrisant mal ma jambe gauche affaiblie par les traumatismes subis, je suis parvenu dès le samedi à me déplacer seul avec un déambulateur. J’ai pu ainsi aller prendre une douche, saluant avec bonhommie au passage, et sous l’étonnement des infirmières, les autres patients.

Le lundi, malgré la proposition d’un fauteuil, je gagne avec mon déambulateur et mes bocaux le service de chirurgie. Je suis tellement heureux que je demande à une infirmière de filmer. Je pourrais ainsi faire partager à mes proches ce moment de bonheur. Marcher, même si le pied gauche est à la traîne. La jambe fonctionne c’est l’essentiel. Les prévisions étaient pires.

Avez-vous été entouré pendant cette nouvelle étape ?

Des soignants souriants pour accompagner Lionel pendant son combat contre le cancer
Durant mon séjour en chirurgie, je pourrais voir mes deux fils sur le parvis du CLB. Les mesures sanitaires m’empêchent de les serrer dans mes bras. Le soir, j’aurais un sentiment de joie mêlée de frustration.

Pendant ces 15 jours, je ne communiquerai par téléphone qu’avec un cercle restreint de proches : mon épouse, mes fils, ma mère et mes beaux-parents.

Une page Facebook dédiée à ce séjour avait été créée par mes fils où dès le 12 des nouvelles étaient données par eux à mon cercle d’amis. C’est avec du baume au cœur que je lisais les messages d’encouragement aux nouvelles données et à la vidéo de mon court trajet. Des posts pleins de bonnes paroles d’encouragement et d’humour pour certains.

Comme dans les autres services où j’ai séjourné, je rencontre en chirurgie du personnel hospitalier rempli d’empathie, à l’écoute.

Je craque un peu lors de la 3éme séance de kiné, me rendant compte, à ce moment-là, du chemin que je dois encore accomplir pour parvenir à une mobilité quasi normale. Les muscles releveurs de la jambe gauche ne fonctionneront plus et je vais avoir un pied tombant. Un pied équin comme ils disent, c’est le comble pour un Cavalier…

On me donne une attelle dès le mercredi. Son rôle : maintenir le pied gauche à 90 degrés. Je peux enfin me déplacer avec une béquille et surtout avec l’aide de Sandy, la kinésithérapeute.

Comment avez-vous vécu le retour à la maison ?

Je sors le dimanche 24 mai 2020. Mikael, mon fils aîné, est venu me chercher et me ramène à Paray Le Monial. J’ai, bien sûr, attelle au pied et une béquille. Nous échangeons quelques mots sur ce que je viens de traverser et ce qui m’attend. A l’arrivée, j’éclate en sanglots dans les bras de Geneviève, ma femme

 Je me vois réellement comme un boulet. L’herbe a poussé. Comment ça va se passer pour l’entretien des extérieurs ? Je suis handicapé par ma jambe gauche qui est à la traîne. Comment vont se faire tous ces travaux que mon épouse ne peut faire. Mon oncle et ma tante, également présents, se veulent rassurants.

Je suis encore bien fatigué aussi et cela augmente mes angoisses. Quelques jours se passent et je réagis. Non, je ne vais pas me laisser aller à rester dans un fauteuil et attendre que les jours se passent. J’essaye de voir le positif. Petit à petit, mes idées se font plus claires et j’envisage l’avenir avec optimisme.

Un rendez-vous post-opératoire avec le Docteur MEEUS me fait voir la comparaison sportive de mon traitement d’un autre œil. Il m’annonce : « Bon, maintenant 2ème mi-temps (ha ! ces rugbymen). Radiothérapie…j e nous vous l’avais pas dit »… Ou peut-être ne l’avais-je pas entendu.

Ce sera donc la phase récupération après la ligne d’arrivée, avec 25 séances. La dernière le 2 septembre 2020. La boucle est bouclée avec le 4 septembre 2019. Aucun effet secondaire.

Quel premier bilan faites-vous après traitements ?

Au sortir de cette opération, je me retrouve donc en situation de handicap de la jambe et du pied gauche avec nécessité de porter une attelle de steppage. Perte de sensibilité partielle du pied. Le nerf obturateur gauche a été sectionné et le nerf sciatique partiellement altéré. Les muscles releveurs du pied gauche ne fonctionnent plus.

Un traitement médicamenteux et des séances de kinésithérapie sont mis en place. Comme annoncé par le Docteur MEEUS, j’ai des problèmes urinaires, de transit et sexuels…… je ne peux me déplacer comme auparavant et agir librement dans la vie quotidienne.
Je me dois de réagir. J’ai rencontré des cas plus graves que les miens dans les services, j’ai croisé des enfants sans cheveux, mais plein d’entrain. Des femmes de tous âges avec un foulard sur la tête poussant leur pied à perfusion, avec pour beaucoup d’entre elles de la détermination dans leur regard.

Nico, à qui on annonce qu’il a un cancer à un testicule le même jour et par le même médecin qui annonce à son épouse qu’elle a un cancer du sein. J’ai eu mal psychologiquement.
Lionel et sa femme à la maison après le parcours de soins de cancer
J’ai relativisé mon mal à leur rencontre même si comme il me l’a été dit mon cas est également grave et rare. La bête à abattre était conséquente : 17cm x 6cm au scanner, mais 20cm x 10cm au sortir et à l’anapath bien étalée sur la plaque. La plancha est grosse….

Comment s’organise votre nouvelle vie post-cancer ?

Mon nouveau médecin traitant, le Docteur GUILLOU, me délivre une ordonnance de kinésithérapie, avec pour objectif de retrouver la mobilité et la tonicité de la jambe gauche.

Laurine MESNY une toute jeune kinésithérapeute accepte le challenge de mon but à atteindre : trottiner au mois de décembre.

Des séances de kiné sont donc programmées en concomitance avec la radiothérapie jusqu’au 02/09/20 deux à trois fois par semaine. Ensuite elles passent à trois ou quatre, pour être à quatre à l’heure actuelle. Elle a l’esprit fécond en ce qui concerne les exercices, car j’ai rarement fait plusieurs fois les mêmes.

La progression est telle qu’à M+4 je pose ma béquille. Je parviens à me déplacer sans, mais toujours avec mon attelle. Celle-ci ne devra plus me quitter pour une marche normale en extérieur. A la maison, je peux marcher sans.

Ce n’est plus la démarche que l’on peut qualifier de normale que j’avais avant, mais je marche sans béquille. Ce qui n’était pas prévu en décembre 2019, ni même en avril 2020 (date de l’acceptation définitive de l’opération). Donc actuellement, avec 4 séances de kinésithérapie par semaine, ma jambe gauche a retrouvé de sa tonicité, mais il reste encore du travail.

À M+8, j’ai pu recourir tout d’abord 1 km en 3 étapes puis quelques jours après d’une seule traite. Maintenant en parallèle donc avec les séances de kiné, il va y avoir une séance de course (si l’on peut dire) sur piste de temps en temps.

Il y a peut-être des objectifs dans un coin de ma tête, mais je ne les laisse pas dominer ma reconstruction. Je me dois d’avancer au jour le jour, toujours en progressant de manière rationnelle, sans brûler les étapes. M’aidant également avec les thérapeutes et psychologues rencontrés au début du combat.

Avez-vous eu d'autres résultats d'examen depuis ?

J’ai passé un scanner post-opératoire le 06 novembre 2020. RAS. Le Docteur MEEUS rencontré le 09 novembre est très satisfait du bilan et de mon état de santé. La zone opérée est propre de toute cellule cancéreuse. Des contrôles sont prévus en cette année 2021. Tout d’abord, Docteur DUFRESNE en mars puis Docteur MEEUS en juin.

Que vous a révélé sur vous ce combat contre le cancer ?

Ma résilience est née et a grandi dans les relations humaines qui se sont construites tout au long de ma maladie. Ma femme et mes fils qui m’ont entouré et porté, les membres de ma famille qui ont régulièrement pris de mes nouvelles. Les amis qui téléphonaient régulièrement.

Mais aussi dans les rencontres pleines d’empathie avec le personnel du CLB. Des paroles rassurantes m’ont ainsi apporté du baume au cœur. Petit à petit donc, de part et d’autre de moi-même un échafaudage s’est monté pour me soutenir et me porter.

Reprise de la course à pied pour Lionel après son combat contre le cancer
J’ai découvert ainsi en moi une force de caractère insoupçonnée. Même s’il y a eu des moments de déception et de larmes, j’ai toujours su rebondir avec optimisme ne me fixant pas d’objectif réel, prenant les choses une par une pour avancer. Une par une pour ne pas avoir de grosse déception.

J’ai aussi été grandement aidé par des thérapeutes et psychologues. Je me suis redécouvert pour affronter le monstre et me battre. Toujours avancer, luttant sans relâche pour tenter de retrouver une vie quasi normale.

Quels messages aux personnes qui vous ont accompagné ?

Je remercie donc du fond du cœur mon épouse Geneviève, mon fils Mikael et mon gendre Rémi, mon fils Benjamin et sa compagne Victoria, ma mère Lilas et mes beaux-parents Jo et Odette, mon frère Jean Daniel, mon beau-frère et ma belle-sœur Gilles et Régine.

Surtout aussi mon oncle Jean Claude et ma tante Yvette et ma cousine Anne. Ma jumelle Isabelle et son mari Lucas. Ma famille et mes amis proches ou éloignés.

Les Docteurs MEEUS, DUFRESNE, MONTCHARMONT, DUPLOMB, ALEKSIC et leurs équipes, les anesthésistes, Sandy la kiné, Dominique de l’accueil information, Agnès la socio esthéticienne.

Toute l’équipe du 2BN qui a pris une grande part dans ma résilience. Je ne peux nommer toutes les personnes même si j’ai eu plus d’affinités avec certaines et ai même gardé des contacts pour un challenge sportif avec l’une d’entre elles.

Le service de chirurgie et des soins intensifs. Solène ma coach sportive au CLB. Et tout le reste du personnel du CLB sans exception aucune.

La Docteur GUILLOU mon médecin traitant. Céline, Marie, Agnès et Michel mes IDE toujours disponibles et avec des paroles rassurantes. Marylène hypnothérapeute, Maud réflexologue plantaire, Anne Marie psychologue.

Mes collègues de travail à FV71 : Agnès, Nadia et Marine ainsi que le conseil d‘administration.

Laurine, ma kinésithérapeute, qui a accepté le challenge de me remettre sur pied et qui y parvient.

J’en oublie certainement et veuillez m’en excuser. Au CLB j’y ai également fait de belles rencontres, des personnes comme moi des patients avec qui nous avons pu partager nos doutes et nos angoisses mais toujours avec pudeur.

MERCI MERCI MERCI

Le mot de la fin de Rue du Colibri

A notre tour de remercier chaleureusement Lionel.

Sans tomber dans des clichés, les hommes semblent avoir plus de mal à parler de la maladie. Qu’un homme se livre ainsi sur son combat contre le cancer reste plutôt rare. Ce témoignage nous touche donc particulièrement et nous honore.

Nous espérons qu’il ouvrira la voie à la libération de la parole chez de nombreux autres hommes. Parler de son vécu et de son ressenti avec des pairs apporte du réconfort. S’appuyer sur la communauté de malades fait partie des aides précieuses que toute personne, homme ou femme, peut solliciter dans son combat contre la maladie et notamment le cancer.

Trois ans après ce premier témoignage, Lional nous a fait une nouvelle fois l’honneur de se confier à nous, dans une interview sur sa vie après son cancer.

Nous expédierons toutes les commandes passées jusqu’au 23 décembre à 16h.

Et reprendrons les livraisons le 2 janvier.

Passez de Belles Fêtes !